BIOGRAPHIE

" Je suis né un peu moins de 3 ans avant mai 68, c'est, il me semble, le seul fait intéressant et fondamental : avoir 7, 8 ,9 ,10 ans dans les années qui ont suivit cet événement perturbateur et salvateur. En plein ronronnement des trente glorieuses finissant de s’effilocher, cela me donnait dans un sens la désagréable sensation d'arriver à la fin du bal, quand les danseurs sont partis, qu'il reste les lumières et que les musiciens remballent leurs instruments... La buvette sert encore et à l'échelle de la société et de ma vie , la buvette c’était la télé ! En noir et blanc bien sur, elle montrait des émissions comme « Point chaud» avec ses reportages sur les rassemblements de musique Pop et des musicos de l'époque... Quand tu vis dans la banlieue d'une ville plutôt pépère comme Pau à l'époque, malgré ses universités, tu te dis soudain, sans pouvoir le formuler, qu'il y a un autre monde possible ! Et puis, les rediffusions des « exploits » américains sur la Lune, soutenus par la petite bande de Jim Henson avec ses « Cochons dans l'espace », les anglais de « Cosmos 1999 »... 

Qu'est ce que ça pouvait me fasciner « 1999 » ! Et l'an 2000, ça c’était une perspective pour un gamin, pfou !...vertigineuse ! Il y a eu l'an mil et nous on aura l'an 2000... Et puis « La France défigurée », déjà ! La bande annonce de la « Planète sauvage » de Laloux et Topor, « Il était une fois ... l'homme » d'Albert Barillé avec la grande toccata de Jean Sébastien comme générique, et le ciné club avec la possibilité de voir des films comme « La vallée perdue » et « La vie future » quelles découvertes, et puis une émission comme « Tac au tac » ; Druillet , Moebius, John Buscema , Wolinski, Forest qui dessinent devant toi, petite éponge à absorber du merveilleux, du créatif, du spontané , de l'instantané, directement du cerveau à la main , Pof ! L'image, le papier le « paper board », le feutre... 

Ah!Le feutre , quelle invention pour un gamin de 8 ans de s'inventer un univers. Un univers accessible, à sa portée où personne n'a foutu ses grosses pattes pleines de reproches ou d’incompréhension, et puis le corollaire de ces images animées : la Bande Dessinée !

Ma Mère m'avait abonné à « Pif gadget », elle avait essayé avec « Marysette et fripounet » ! sans pas trop insisté. Je la remercie. Et puis la bibliothèque municipale dans la rue où j'habitais...

Il faudrait toujours avoir une bibliothèque municipale dans sa rue quand on a 8 ans en 1973, et puis les albums BD plus adultes du voisin, en fait les BD de son père , non pas des BD érotiques mais les albums tirés des épisodes à suivre provenant de la nouvelle BD issue elle de la « révolution »...



« Morale », « Immorale », « Amorale » ?... engendrée par Mai 68 : Ah ! La gueule de Franco au moment de son trépas dessiné dans   dans «Fluide» avec une seringue planté dans la veine du bras, je crois deux ans avant la venue des Punk, c’était bien vu. Et puis un peu plus tard les comics américains avec leur ribambelle de super héros, de la BD trop facile , à lire, à dessiner et surtout qui ne permet pas de véritablement s'identifier et se construire : L'Araignée, toujours dans la merde, qu'il soit Peter le reporter ou le sauveur de Brooklyn : désespérant. 

Heureusement l'année de mes 13 ans dans ma classe se pointe Rick ! Rick est américain il porte une doudoune en duvet, la même qui fera dire à un employé de bar des années 60 dans « Retour vers le futur » au héros venant des années 80 « Pourquoi vous vous baladez avec un gilet de sauvetage ? On est à terre ! heu! », mais surtout Rick sous sa doudoune à une bombe ,et cette bombe à pour nom, non pas « Enola bay » mais :...MAD ! Du délire ! du burlesque ! du trash ! du n'importe quoi ! du génie quoi! 

Et puis cette même année on fait du latin avec Mr Case et Mr Case en plus de m'apprendre les déclinaisons latines me dit de lire, ou plutôt d'ouvrir une des portes de la perception, « Metal hurlant » et là Bingo ! Que de l'hyper lourd. On reprend les même qu'à « Tac au tac » et ça bombarde ? Mais que c'est bon ! Audacieux, irrévérencieux,ingénieux, puissant. 

J'aime le dessin , c'est ce que je préfère faire, c'est ce qui m'enchante , on me demande ce que j'aimerai faire comme métier, quelle orientation prendre ? Ben celle là, celle de la BD. Holà Bijou ! « Faut qu'tu passes ton bac d'abord » ! Ouaih ! En dessin ça va, en français c'est dans la moyenne, en histoire-géo tu t’intéresses bien , mais en MATH !!! « Tu le sais pourtant que pour pouvoir dessiner des petits Mickey, il faut connaître les équations à deux inconnues, alors, pourquoi tu fais pas l'effort de comprendre, hein !...Allez, tu veux quand même faire du dessin, t'es nul en math alors tu feras...dessinateur... en construction mécanique ! Voilà ! encore un de casé et roulez jeunesse ! ».

Un peu avant j’étais tombé sur un album déterminant pour moi : « Le clan des centaures » de Claude Auclair, si il ne devait l'avoir écrit que pour un seul lecteur : j'étais celui là ! bA la lecture des autres albums, je comprend, n'en déplaise aux... (Je sais pas à qui ? Disons « Aux casses couilles » qui flagornent en disant que la BD n'est pas de la littérature), que certains écrivains de bande dessinée ont su par le subtil mélange d'une belle écriture et d'un dessin pointu produire une manière d’écrire hyper-réaliste, au delà de la description la plus imagée. 

Avec Claude Auclair on chemine vers d'autres sentiments, d'autres perceptions, d'autre illuminations ; une collusion du texte, de la façon d’écrire et de dessiner, avec la formidable analyse de l'actualité de son époque, confronté aux conséquences supposées dans le futur. Et puis la bousculade des sentiments, que les humains ont les uns pour les autres et que le lecteur ressent aussi si intensément. Et dans cette veine du moment, à la fin des années 70 qui sonnent le réveil et l'abandon des belles illusions pour des décennies de pragmatisme affairiste, dessine Michel Crespin avec ses aquarelles aux teintes d'automne qui, je crois à l'époque, représentent les paysages de l’arrière pays niçois. 

Je survole aussi les descriptions d'un monde en déliquescence se situant lui dans les paysages vertigineux des états-unis illustrés par Hermann. Pour ma part, créativité et avenir ne tourne pas très rond, j'abandonne cette deuxième année ennuyeuse de dessinateur industriel, pour aller aider mon père qui se morfond dans une petite boulangerie du Var : avoir le sentiment d’être utile à quelqu'un quelque part ; Erreur ! la seule personne à qui on doit être utile c'est à soi même , ici et maintenant. 

J'abandonne toutes illusions , me plonge , et me noie dans cette nouvelle activité. Je continue un peu à dessiner, j'envoie quand même un projet tout au crayon pour un concours organisé par Métal hurlant, enfin il est au crayon parce que je n'ai pas pu le rendre encré et colorisé à temps... Il me faudrait plus de temps, oui mais avec des nuits passées au fournil et un sommeil sans repos dans l’après midi, je suis sans grand enthousiasme ni énergie pour persévérer. Deux ans passent puis c'est le service militaire dans l’arrière pays varois, là, malgré le caractère obligatoire et coercitif, je m’aère l'esprit et les paysages que je j'arpente me ramène aux images crées par Claude Auclair et Michel Crespin. Il y a même pour accentuer cette perception les « Hommes en vert », forcement,on est au camps de Canjuers , le camps qui à été construit suite aux courageuses batailles menés par les paysans et les militants du Larzac pour qu'il n'y ai pas ce genre d'absurdité sur leurs terres. Là, confronté à certaines petites choses surprenantes, comme de voir se former dans ces montagnes sur des véhicules militaires bourrées d’électronique des cadres de l'armée Algérienne et soit disant Libanaise à qui il nous était interdit d' adresser la parole. L''affolement après la catastrophe de Tchernobyl, en les voyant nous sortir tout l’attirail de décontamination de campagne. Avec le recul, je sais pas si les russes n'avaient pas « assurer » en sacrifiant des dizaines de milliers de « Liquidateurs » si ils nous auraient pas envoyer prendre quelques pelletées de becquerels pour sauver le monde « Libre », a ce moment là je repensais à la dernière image de l'album « Maïlis » de Claude Auclair, j'ai su plus tard qu'une centrale nucléaire ne pétait pas comme une bombe atomique avec le champignon et tout, mais l'image avait le don d’être parlante. Cependant, les de dix ans à peine écoulés entre la réalisation et la lecture de cette BD et la vraie catastrophe, me donnait à réfléchir sur la viabilité de cette société hyper technicisée.


Pour ma part, je persiste dans mon désir de dessiner, mais emporté par les injonctions de le vie, je me pers, jusqu'à ce que je découvre dans le magasine Geo qu'un rêve plus communautaire continue à exister prés de Forcalquier... 

Là on est totalement dans la description que fait Claude Auclair dans « Le clan des centaures » : une vie en accord avec la nature et les hommes. Ce seront deux ans d’expériences formidables chargées de sens et prises de consciences pas toujours faciles à accepter et à voir mais qui permettent de se structurer plutôt que de se sentir toujours dilué. Puis le retour au bercail, l'aide apportée aux parents, le décès de mon père, l'envie d’être créatif de nouveau ; la tentative de monter une petite entreprise pour faire des enseignes en fer un peu comme au moyen-age... 
Puis la rencontre avec celle qui après deux ans de vie commune deviendra mon épouse, et qui me soutient depuis sans défections.

Quelques années comme peintre décorateur sur la « Côte » semblaient me convaincre d’être arrivé là où je devais pouvoir m'exprimer. 

Mais, en 2007, on décide de quitter le Var et de s'installer dans une petite vallée de la Drôme, prés de Nyons.  Là, accompagné de la lecture de René Barjavel enfant du pays et initiateur de la science fiction française, je découvre, dans ces paysages très « minéral », de nouveau les images des albums de Claude Auclair et de Michel Crespin. Tous deux, hélas, sont morts il y a déjà des années. Mais, dans cet univers en prise directe avec la nature, la réhabilitation d'une vieille maison dans le village perdu où nous vivons et la crise financière qui secoue le monde ramène l'envie de ce qui me stimule et me fait vibrer. 

A partir de 2010 j'élabore un scénario, un contexte, un lieu, des personnages, les circonstances ne me permettent pas de finaliser mon projet... jusqu’à ce que je rencontre Olivier Dalmon des « Ecriculteurs ». Enfin ce projet, qui m'habite depuis... mon enfance, si je puis dire, quand, vers 6 ou 7ans, je vis mes parents, oncles et tantes, ensemble, remodeler le potager de mes grands-parents. Depuis cette époque où j'ai sentis cette exaltation, cette envie, cette énergie de création s'incarner dans le vivant et le réel avec la force et l'engouement de la jeunesse et le savoir et l’expérience du vécu des anciens. Ce projet de bande dessinée repose donc sur ces sentiments de plénitude et d'harmonie que j'aimerai se voir renouvelé à l’échelle d'un petit village.Il est étayé par mon désir d'utiliser la bande dessinée comme medium et la subtile manière de développer une histoire comme le faisait dans ce domaine mes mentors cités plus haut."




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